Paris 2024 « C'est indescriptible » : l'Alsacien Benjamin Toniutti, double champion olympique avec les volleyeurs français

Présent depuis 14 ans en équipe de France, nommé capitaine des Bleus deux ans après son arrivée, Benjamin Toniutti est encore un peu plus entré dans la légende du volley tricolore, ce samedi à Paris, où il a été sacré champion olympique pour la deuxième fois d’affilée. En finale, le passeur pfastattois de 34 ans a encore joué un rôle essentiellement de l’ombre, tout en se montrant décisif à chacune de ses entrées face à la Pologne, laminée 3 sets à 0 (25-19, 25-20, 25-23).

A Paris, propos recueillis par Fabien Rouschop - 10 août 2024 à 18:05 | mis à jour le 11 août 2024 à 21:21 - Temps de lecture :
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L'émotion de Benjamin Toniutti après la victoire en demi-finale contre l'Italie. Photo Jean-Marc Loos

L'émotion de Benjamin Toniutti après la victoire en demi-finale contre l'Italie. Photo Jean-Marc Loos

Benjamin Toniutti, réalisez-vous la portée de votre exploit, alors que seuls l’URSS (1964 et 1968) et les Etats-Unis (1984-1988) avaient réussi le doublé aux JO avant vous ?

C’est dur de réaliser, mais ça va venir petit à petit. Ce n’est pas facile de trouver les mots. Quand j’étais gosse, on était en camping en vacances, j’avais regardé les JO de 1996 à Atlanta à la télé et j’avais vu "Giangio" (Ndlr : Andrea Giani, le sélectionneur de l’équipe de France) perdre avec l’Italie en finale contre la Hollande. J’avais déjà ce rêve de jouer les Jeux olympiques à l’époque. A Rio, en 2016, on tombe en phase de poules, c’était dur. A Tokyo, on gagne, mais on ne savait pas trop où on était. Heureusement, on savait que trois ans plus tard, on aurait cette chance de jouer les JO à la maison.

De les gagner chez nous, c’est un sentiment décuplé et je ne sais pas trop comment gérer ça. L’aventure a été incroyable, l’état d’esprit, ce qu’on a pu mettre comme cœur, c’est fou. Ce tournoi, on l’a gagné avec le cœur, avec les tripes. En quarts de finale, on est menés 2-0 par l’Allemagne, on renverse la situation. Puis on fait deux matches, contre l’Italie en demie et là contre la Pologne en finale, où on a l’impression que tout ce qui se passe va en ta faveur. Le service qui prend le filet et retombe de l’autre côté, le changement avec Quentin (Jouffroy) qui nous fait trois breaks au service en fin de match… Tout s’est passé comme on l’avait rêvé.

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C’est encore allé au-delà ce que vous imaginiez, non ?

On s’est clairement transcendés grâce à ce public. Même quand on était derrière, on avait l’impression d’avoir quatre points d’avance. La pression qu’ils ont mis sur l’équipe adverse, c’était dingue. On vit ça souvent en Pologne, parce qu’ils organisent beaucoup de compétition, mais là, de pouvoir gagner devant notre public contre la Pologne, ça fait quelque chose.

« C’est la soirée du volley français, pas celle de Ben Toniutti »

Est-ce au-dessus du titre à Tokyo en 2021 ?

A Tokyo, on avait gagné devant 300 spectateurs, là c’était devant 12000 personnes, pour nous en plus, avec tout le pays derrière qui te suit. Donc ce sont deux titres complètement différents. Le premier, ça restera le premier, c’est quelque chose de gravé. Le deuxième, tu le vis chez toi… Je pense que ç’a été des JO incroyables, vraiment incroyables. On a senti une telle ferveur. Moi qui joue dans un pays (Ndlr : la Pologne, depuis bientôt dix ans) où il y a une vraie ferveur pour le sport et pour le volley, je pense que là, je l’ai vécu en France, et je suis très fier d’être français, d’avoir pu vivre ça dans mon pays.

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On sent une énorme émotion pour vous aujourd’hui, différente que d’habitude…

J’en rêve depuis tout petit, et voilà, j’y suis. Une deuxième médaille d’or. Pfff (il sourit). C’est indescriptible.

Qu’est-ce que cette équipe a que les autres n’ont pas ?

Je pense qu’on a joué à la française.

C’est quoi le jeu à la française ?

C’est que pour faire un ace face à nous, il faut que le mec serve à 145 km/h sur la ligne. Et que ça agace si le mec envoie une bombe et que le gars chez nous fait quand même la réception et gagne le point. Ça permet de pousser l’adversaire à la rupture, ça le fatigue. Donc notre jeu, c’est la solidité mentale, la solidité collective, c’est chacun qui amène quelque chose.

Est-ce l’explication à vos deux matches en demi-finale et en finale, où tout a semblé tellement facile pour vous ?

C’est une impression, bien sûr, mais c’est vrai que chacun a joué à son meilleur niveau, chaque entrée a été décisive. T’as l’impression que tout va bien se passer, on est sereins, alors que sur les deux derniers matches, on a joué les deux meilleures équipes du monde sur les deux dernières années. L’aide du public, ça te donne de la confiance en plus. On était stressés en début de compétition, mais petit à petit, on a réussi à apprivoiser cette ambiance.

Trevor Clévenot (à gauche, félicité par Earvin Ngapeth), « le joueur de ces JO » pour son capitaine Benjamin Toniutti. Photo Sipa/Chine Nouvelle

Trevor Clévenot (à gauche, félicité par Earvin Ngapeth), « le joueur de ces JO » pour son capitaine Benjamin Toniutti. Photo Sipa/Chine Nouvelle

D’où tirez-vous cette stabilité émotionnelle justement ?

Je pense que le métronome de cette stabilité, c’est Earvin (Ngapeth). S’il fait la gueule, l’équipe fait la gueule, s’il est joyeux, l’équipe est joyeuse. A 2-0 pour l’Allemagne en quarts, il a répondu présent, il a été décisif sur ces Jeux olympiques, comme à Tokyo. Après on a tous été incroyables individuellement, à commencer par Trevor (Clévenot). Pour moi, c’est le joueur de ces JO.

Avez-vous pris votre décision quant à la suite à donner à votre carrière internationale ?

Ce n’est pas le moment de parler de ça. C’est la soirée du volley français, pas celle de Ben Toniutti ou de quelqu’un d’autre. On va prendre le temps de réfléchir, mais le plus important, c’est de parler du volley français, là, maintenant.

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