L'édito En quête de l’oiseau rare
Tout juste rentré de Belgrade, où il a tenté d’« arrimer » une Serbie toujours très poutinophile à l’Union européenne en lui concédant la vente de douze avions de combat Rafale (on espère que le fleuron de Dassault ne satisfera pas trop tôt la curiosité d’ingénieurs russes…), Emmanuel Macron s’est aussitôt replongé ce vendredi dans une quête tout aussi improbable : celle d’un(e) Premier ministrable qui ne soit ni trop à droite, ni trop à gauche, ni surtout trop entreprenant(e) ou indépendant(e) d’esprit. Un oiseau rare susceptible de distiller un « parfum de cohabitation » dans l’opinion, sans réellement dévier du cap politique fixé en 2017. Un mouton à cinq pattes capable de donner des gages à la frange la plus conciliante du Nouveau front populaire (NFP), sans s’aliéner la droite républicaine. Enfin, une « tête nouvelle » (ou qui en ait l’air), dotée d’assez d’expérience pour éviter à son gouvernement de chuter à la première bourrasque parlementaire (au hasard : une motion de censure).
Gageure ? Injonctions contradictoires ? Le pays attend en tout cas toujours le nom de l’heureux (-euse) élu(e), tandis que nombre de « dossiers chauds » restent en souffrance. La rentrée scolaire de ce lundi se déroulera sans ministre de l’Éducation nationale de plein exercice ? Bah, cette agréable sensation de « bride sur le cou » n’est pas pour déplaire aux professeurs. Le projet de loi de finances 2025 doit impérativement être présenté à l’Assemblée nationale le 1er octobre prochain ? Quitte à outrepasser ses prérogatives de Premier ministre démissionnaire, Gabriel Attal y pourvoit en coulisses, en multipliant les coups de rabot… Tandis que la CGT appelle au contraire à « une grande journée de grève et de manifestation », en faveur du financement des services publics, de la hausse du smic et du pouvoir d’achat, pile pour ce même 1er octobre.
Énième signe d’un pays plus clivé que jamais, et tiraillé entre des lignes antagonistes qui ne feront que croître, à moins que le prochain Premier ministre assume enfin une forme de compromis politique, qu’il ne faudra pas confondre avec une compromission politicienne.