L'édito L’homme qui ne veut pas perdre
Isabelle Bollène, journaliste à L'Alsace. Photo Vincent Voegtlin
« Emmanuel Macron, c’est l’homme qui ne voulait jamais perdre ». Cette petite phrase désabusée d’un militant socialiste en dit long sur la colère d’une partie des électeurs de gauche. En écartant toute perspective d’un gouvernement NFP, le président de la République leur a claqué la porte au nez. Il montre en effet ainsi que ce n’est pas la seule France insoumise qu’il récuse, mais bien tout le programme du NFP, pourtant arrivé en tête aux législatives. Si Emmanuel Macron est qualifié « d’homme qui ne voulait jamais perdre », c’est parce qu’il apparaît de plus en plus aux yeux des Francais qu’il veut bien, à la rigueur, d’un Premier ministre qui ne soit pas issu du bloc macroniste, mais qu’il n’entend nullement voir un gouvernement appliquer une politique trop différente de la sienne. Il en est convaincu, il ne faut pas toucher à la fiscalité, ni à la politique de l’offre, encore moins à la sacro-sainte réforme des retraites. Il s’accroche donc à son projet de « majorité républicaine » allant des LR à la gauche non LFI, avec un pivot central qui permettrait de garder grosso modo le cap macronien.
Ce qui pose deux problèmes : d’une part, cette politique a été clairement rejetée par les deux tiers des électeurs français. Vouloir la poursuivre comme si rien ne s’était passé poserait un problème démocratique et ouvrirait pour 2027 un boulevard vers l’Élysée au RN. Et d’autre part, la « coalition républicaine » ne pourra fonctionner qu’avec l’implosion du NFP et le ralliement des partis non LFI. Ça aurait marché plus facilement si le président avait apporté la preuve qu’un gouvernement Castets était intenable en le laissant tenter sa chance à l’Assemblée. Pour l’instant, le Parti socialiste tangue un peu mais le NFP, furieux, tient bon. Le ou la futur(e) Premier(e) ministre aura du pain sur la planche pour arriver à élaborer sa coalition républicaine. Seul une personne consensuelle aura une chance d’y parvenir en nouant un pacte de « non-censure » et en essayant de trouver, en dehors de tout parti pris, des projets de loi susceptibles de répondre aux attentes des Français.