L'éditorial L’immigration sans clichés
Les études publiées hier par l’Insee sur l’immigration ont un gros avantage : nous en livrer une photographie… sans clichés. Car s’il y a un sujet qui suscite de nombreux fantasmes, c’est bien celui-là : « grand remplacement », « submersion migratoire », « invasion »… Les mots claquent et visent à effrayer. La peur, en effet, est devenue un fonds de commerce pour certains partis politiques.
Il ne s’agit pas, bien sûr, de dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, mais de discuter d’un problème complexe sur la base de chiffres sérieux et fiables. Que nous disent ces études ? Que la part des immigrés dans la population française augmente (10,7 %) mais sans flamber, que les immigrés d’origine africaine travaillent (un sur dix seulement est au chômage) mais se sentent déclassés, que l’immigration européenne existe toujours. 7,3 millions d’immigrés vivant en France au sein d’une population de 67,97 millions, on est encore loin du grand remplacement. Le vrai problème, sans doute, celui que perçoivent une partie des Français, est moins celui du nombre que de l’intégration. La pratique de la langue, le respect de la laïcité et des valeurs républicaines, voilà les demandes de base des citoyens aux étrangers venus dans notre pays. Une demande légitime mais qui doit être accompagnée par de vraies politiques d’inclusion. Comment mener ces politiques, mais aussi comment choisir les étrangers qu’on accueille - un arrêt total de l’immigration étant totalement impossible, ni même souhaitable en raison de la baisse de notre démographie et des besoins de l’économie -, la possibilité d’expulser ceux qui se comportent mal, mais aussi le nécessaire dialogue avec les pays d’origine, tous ces sujets-là sont cruciaux et mériteraient de faire l’objet de vrais débats, dépassionnés. Entre les partis, mais aussi avec les élus, les associations, les syndicats, et les simples citoyens. On peut rêver d’un nouveau pacte social entre les Français et les immigrés, pour construire un vivre-ensemble. Hélas, pour l’instant on en est loin.